Pour ma part, je préférerais mille fois être suspecté dans ma franchise, que de me voir dépouillé du plus bel apanage de l’homme, de ce qui fait sa force et son essence.
Pierre-Joseph Proudhon
Œuvres Complètes de Frédéric Bastiat, tome V, pages 94 à 335
Treizième lettre, pages 290 à 312
L’apanage auquel Proudhon fait référence est l’intellect, qu’il se trouve incapable de trouver chez Frédéric Bastiat. Selon la note de l’éditeur en bas de la page 296, ce dernier aurait répondu quelques mois plus tard à l’occasion d’une forfaiture de Pierre-Joseph Proudhon exigeant de recevoir un intérêt qu’il aura dénoncé avec véhémence: “J’accepte le partage. A moi l’humble intelligence qu’il a plu à Dieu de me départir, à lui, puisqu’il le préfère, d’être suspecté dans sa franchise”. Et de nos jours, quand on relit Gratuité du Crédit, il y a fort à croire que Pierre-Joseph Proudhon faisait effectivement peu de cas de l’honnêteté (tout au moins intellectuelle) et que l’intelligence dont il a pu faire preuve (il était sans aucun doute brillant tribun) lui était tellement égale qu’il ne l’utilisait pas pour développer ses arguments.
Cette treizième et dernière lettre de Proudhon dans cet échange est hallucinante par sa virulence verbale: c’est une litanie d’insultes sur la personne de Frédéric Bastiat et ses qualités intellectuelles entremêlée d’accusations que l’on voudrait porter à son auteur. Je ne suis pas fâché de terminer ici ma lecture (laborieuse) de ses écrits mais un mystère demeure: comment se fait-il qu’en France, le nom de Proudhon soit reconnu quand celui de Bastiat est ignoré? La postérité semble mettre plus longtemps que prévu à faire son effet.
Autres citations choisies sous Gratuité du Crédit:
Première lettre – Deuxième lettre – Troisième lettre – Quatrième lettre – Cinquième lettre – Sixième lettre – Septième lettre – Huitième lettre – Neuvième lettre – Dixième lettre – Onzième lettre – Douzième lettre – Treizième lettre – Quatorzième lettre