C’est donc à tort que quelques auteurs, dont l’opinion était influencée par le spectacle de taxes écrasantes et abusives, ont considéré comme perdue toute valeur consacrée aux services publics.
Frédéric Bastiat
Œuvres Complètes, tome VI, page 537
Harmonies Economiques
Une citation en note de bas de page nous apprend que l’auteur de cette grossière erreur n’est autre que Jean-Baptiste Say! A sa décharge, une deuxième citation permet de minimiser l’erreur en laissant entrevoir la possibilité d’une utilisation non spoliatrice de l’impôt. Il est évident que les services publics peuvent avoir de la valeur, même si, comme on l’a vu, elle est impossible à déterminer correctement: Frédéric Bastiat fait notamment référence à l’instruction publique. Or les enseignants aujourd’hui sont convaincus d’être “sous-payés” et un bon nombre de contribuables pensent que l’Education Nationale coûte trop cher: voilà un parfait exemple de la difficulté à valoriser le service! Mais personne ne pense qu’il n’a aucune valeur.
L’erreur soulignée par la citation du jour a pu en outre être amplifiée par le fait que la notion de valeur n’a réellement était comprise qu’après 1870: au début du XIXème siècle, certaines théories allaient jusqu’à ne trouver de la valeur que dans les biens matériels, les services “purs” tels que l’intermédiation commerciale étant considérés comme étant sans valeur (auquel cas, le service public qui n’est pas un bien n’aurait pas de valeur non plus).
Par-contre, s’il est clair que la valeur n’est pas perdue par le simple fait que la taxe finance un service public, l’inverse n’est pas vrai non plus et il ne suffit pas d’être un service public pour être créateur de valeur. Frédéric Bastiat dénonce ici le multiplicateur keynésien avant sa naissance et qui se traduisait alors par la théorie des ricochets. Si de nos jours, elle est dénoncée par ceux qui pensent que la théorie des ricochets est une justification de la richesse des riches, elle était utilisée à l’époque pour justifier de la richesse des fonctionnaires. Si l’on considère que cette théorie veut que celui qui dépense son argent aide l’économie en le faisant circuler, on se moque un peu de savoir si il est riche, pauvre ou gouvernemental. Oui, dépenser son argent augmente la vélocité de la monnaie, ce qui, toutes choses égales par ailleurs, augmente un des termes de l’équivalence PY=MV et donc, le PIB. Sans pour autant déterminer le lien de causalité, cette équivalence ne permettant uniquement de constater la corrélation.
La question qui reste est de définir les circonstances qui vont permettre de déterminer la légitimité d’un service public.
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