La nation ne doit payer de taxes que pour faire face aux services publics.
Frédéric Bastiat
Œuvres Complètes, tome VII, pages 114 à 118
Mémorial bordelais, 30 juin 1846
L’ancien code pénal napoléonien de 1810 comportait un article 291 en vigueur jusqu’en 1905 qui limitait la liberté d’association. Il était possible de demander au ministre l’autorisation et c’est ce que fit l’Association pour la Liberté des Echanges. Cette lettre adressée au ministre et publiée le 30 juin 1846 dans le Mémorial bordelais s’étonne du refus possible de cette autorisation. En filigrane, je comprends qu’il ne s’agit encore que de rumeurs mais c’est l’occasion pour Frédéric Bastiat de présenter deux problèmes majeurs. Le problème essentiel est que devoir demander cet accord n’est pas digne d’une démocratie: la liberté d’expression et d’association devraient être garanties par l’Etat plutôt qu’autorisées. En effet, dans la recherche de vérité, il vaut mieux laisser s’exprimer les dissensions que de les réprimer: si c’est la vérité qui est réprimée, elle fera surface tôt ou tard, sous forme de révolution si nécessaire alors que l’erreur se révélera comme telle, qu’elle soit officialisée ou non, rendant inutile sa répression. L’autre problème est celui de l’Etat de Droit: il semble qu’à l’époque où écrit Frédéric Bastiat, l’article 291 était tombé en désuétude et n’était pas appliqué. Lorsqu’un texte de loi n’est pas appliqué, mieux vaut l’abroger que le conserver et laisser au gouvernement la possibilité de l’appliquer selon son bon vouloir.
La citation d’aujourd’hui ne constitue pas l’essentiel de la lettre mais illustre son argumentaire. Je la relève car elle révèle une position essentielle des libéraux qui, au contraire des constructivistes, ne pensent pas que le gouvernement doit être omnipotent mais doit être limité dans ses attributions et ses responsabilités. Limiter les taxes au financement de ces attributions est le meilleur moyen de s’assurer qu’il n’outrepasse pas ses prérogatives.